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PIONNIERS ET PRECURSEURS > ALEXANDRE SCRIABINE > RESONANCES
   



Résonances contemporaines et ultérieures


1) Synesthésie

Dans la lignée de Scriabine, Ivan Wyschnegradsky (1893-1979) crée un Projet pour un temple de lumière. L'architecte américain Claude Bragdon en 1916 crée un spectacle visuel et musical à partir de claviers mécaniques dans Cathedral without Walls. Avec Thomas Wilfred, il invente en 1921 le premier clavilux.

Egalement au début du siècle, les futuristes veulent unir les différentes émotions sensitives : les poèmes de Marinetti mêlent la dimension musicale, les mots en liberté (par le biais d'onomatopées), et les odeurs.

Dans La Main heureuse (1909-1913), Schoenberg prévoit des jeux de lumière et même une version cinématographique de l'œuvre, très marquée également par la théosophie et un symbolisme métaphysique, où chaque élément visuel est conçu comme une vision intérieure ou intime de l'œuvre et concourt à son unité.

La démarche d'Olivier Messiaen rejoint aussi celle de Scriabine dans son rapport aux couleurs qui va aussi de pair avec une dimension spirituelle : le compositeur associe des couleurs à des motifs mélodiques ou rythmiques, il voit ces couleurs en écrivant ; " ce n'est pas de l'imagination, ce n'est pas non plus un phénomène physique, c'est une réalité intérieure 1 ". Selon Jean-Yves Bosseur, " s'il existe une forme de synopsie dans la perception de Messiaen, elle se trouve, selon son propre aveu, certainement plus dans son intellect que dans son corps 2 ".

 

Au cinéma, une grande partie des cinéastes synesthésistes tels Hans Richter, Walter Ruttmann, Viking Eggeling, Oskar Fischinger , (tous peintres à l'origine) a très probablement été inspirée par les recherches d'un Scriabine ou d'un Kandinsky en matière de synesthésie mais également par les manifestations " synchromistes " lors des expositions au Kunstsalon de Munich et la galerie Berheim Jeune à Paris. Le mouvement " synchromiste " (fusion des mots " symphonie " et " chromatisme ") est fondé aux Etats-Unis par Morgan Russell et Mac Donald-Wright dans les années 10 (dès 1912 Russell avait imaginé une machine qui permettrait d'associer le mouvement de lumières colorées et la musique).

En 1921, le cinéaste Oskar Fischinger et le peintre Lazslo Moholy Nagy, (citons aussi sa Lichtmaschine) présentent le Sonochromatoscope au Kunsterfest de Kiel.

 

Plus récemment, dans les années soixante, Nicolas Schöffer, en Allemagne crée un Musiscope, et présente à Hambourg en 1973 Kyldex 1, une " expérience cybernético-luminodynamique ", où des sculptures métalliques intègrent des projections de films, de la musique électroacoustique, et de la danse, et où le déroulement temporel peut être ralenti, accéléré par les participants.

A Kazan, au Tatarstan, Bulat Galeyev et Irina Vanechkina fondent en 1962, après avoir donné une nouvelle version de Prométhée " colorisée ", le groupe " Prométhée " qui réalise des films, Prométhée (1965), ou encore Mouvement perpétuel (1969), ainsi que des installations de " musique colorée ", dont Aurore boréale pour le planétarium de Kazan. Ce groupe effectue encore actuellement de nombreuses recherches sur la synesthésie et crée de nombreux spectacles mutimedia.

En 1969-1972, Manfred Kelkel compose le Tombeau de Scriabine, hommage musical écrit d'après les techniques de Scriabine.

En 1985, la fondation " Scriabine " a été fondée à Amsterdam avec le but de propager le travail de Scriabine. Dès le début, la réalisation de Prométhée était un des objectifs.

En décembre 1992, l'espace Luce a été fondée pour exécuter des pièces mêlant lumière et musique en général et pour fournir une plateforme à la préparation des interprétations futures de Prométhée.

En 1998, Luce réalise l'Acte Préalable (plus ou moins bien reconstitué par Alexandre Nemtin) au Concertgebouw d'Amsterdam sous la direction de Valery Poliansky, avec Alexei Lubimov au piano et Håkon Austbø au clavecin de couleur.

 

2) Musique

Schoenberg, qui lui aussi cherche à réorganiser totalement l'univers sonore, s'inspire des correspondances couleurs-sons de Prométhée (qu'il a découvertes dans le Blaue Reiter) pour écrire l'Echelle de Jacob. On peut aussi dire que le travail harmonique de Scriabine à partir d'un accord échelonné plus ou moins déployé, n'est pas éloigné de la série de douze sons de Schoenberg, et que l'accord prométhéen de Scriabine peut être comparé à l'agrégat de onze sons dans Erwartung de Schoenberg.

Le traitement modal de Scriabine annonce également Béla Bartòk, et Olivier Messiaen. Il est ainsi intéressant de voir par exemple que l'accord par quartes étagées, le fameux " accord synthétique " de Scriabine, lui-même inspiré de l'échelle modale employée par Claude Debussy dans le premier mouvement de la Mer, se retrouve dans l'accord " majeur-mineur " de Bartòk, ainsi que dans les " modes à transpositions limitées " de Messiaen.

 

En allant plus loin, on peut dire que la démarche de Scriabine se rapprocherait, malgré ses moyens rudimentaires, par son travail sur l'espace (la construction d'un temple pour le Mystère, le déplacement des voix et des lumières), de celle de K. Stockhausen ; enfin, la participation des auditeurs, la gestuelle, les sensations tactiles, en font aussi l'ancêtre du happening et du théâtre instrumental.




1 MESSIAEN, Olivier, Musique et couleur, entretiens avec Claude Samuel, Paris, Ed. Belfond, 1986, p.30.
2 BOSSEUR, Jean-Yves, Musique et arts plastiques, Ed. Minerve, 1998, p.171.


© Nathalie Ruget-Langlois & Leonardo/Olats, février 2002


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